Sarah Baud, nouvelle venue dans le polar genevois
Culture / / Sep 29, 2020
Du noir. Du bien noir comme on l’aime. La Genevoise Sarah Baud publie son premier polar, Une fille hors pères, (éd. Slatkine) et c’est une réussite. Après le théâtre et la danse, elle se lance dans l’écriture, imaginant une intrigue complexe autour d’une étrange jeune femme, Nola, dans une ville à l’atmosphère futuriste et angoissante.
Qu’est-ce qui vous a menée à l’écriture et plus précisément au polar pour un premier livre ?
L’envie d’essayer, voir si j’étais capable d’écrire un livre. Je l’ai pris comme un défi, une invitation au combat avec moi-même. Un livre c’est d’abord un terrain de jeu. La page blanche m’offre une liberté d’y écrire ce que je veux, une incitation à faire les choses sans contrainte. Pour mon mode de fonctionnement, décider à l’avance d’écrire un polar revient déjà à rogner sur cette liberté. Je veux, avant tout, raconter une histoire. Une fois qu’elle est écrite, le livre va de lui-même entrer dans une catégorie et en l’occurence, pour Une fille hors pères, dans celle des polars.
Quelles ont été vos sources d’inspiration ?
Mes inspirations viennent plutôt des émotions que je peux ressentir face à toutes les situations qui résonnent en moi, qui me touchent et me marquent. Cela peut être des documentaires, des films, des histoires de personnes, un regard, la nature qui se déchaîne. J’essaie ensuite de transposer ces émotions et de les faire ressurgir dans le comportement de mes personnages.
Comment s’est construite l’intrigue ?
Au départ, je n’avais aucune structure établie. Juste une idée autour de la « double vie ». J’ai adapté l’histoire de manière itérative entre les personnages et les événements au fur et à mesure de l’évolution de l’intrigue.
Quand écrivez-vous ?
Dès que j’ai un moment et à n’importe quel endroit. Cela peut être dans une file d’attente, au café ou dans le tram. Je passe deux heures par jour dans les transports publics, donc j’en profite. Les bruits, les odeurs ou les coups d’œil curieux sur ma tablette ne me dérangent pas, au contraire, plus il y a de « nuisances » autour de moi et plus cela créé un effet bulle. Je plonge ainsi dans un autre monde, celui de la fiction. Il m’est difficile d’écrire dans un lieu calme, même si j’apprécie énormément le silence.
Pourquoi avoir imaginé un pays plutôt que de situer directement votre polar à Genève, ville que l’on devine cependant en filigrane ?
Au départ, j’ai créé une ville futuriste 100% imaginaire mais au fil de l’histoire, j’ai eu le sentiment de manquer de repères, j’ai donc intégré ma ville natale autour de Lémania.
J’aurai pu aussi choisir une autre ville comme New York où j’ai vécu, mais j’ai préféré pour ce premier roman ancrer le décor à mon environnement de vie.
Qu’est- ce qui a été le plus complexe dans votre livre ?
Clairement, les éléments techniques, et c’est pour cette raison que j’ai accordé une importance particulière à me renseigner sur certains sujets comme le piratage informatique ou la conservation des corps. J’avais envie de présenter les éléments du récit de manière aussi fiable et proche que possible de la réalité.
A propos de vos personnages, ressemblent-ils à ceux que vous aviez imaginés au début ? Comment ont-ils évolué ?
Comme l’écriture de mon livre a duré sept ans, mes personnages se sont transformés et ils ont évolué au fil de l’écriture. À l’exception de Nola, mon personnage principal, dont j’avais une image très précise dès le départ.
J’ai trouvé vos personnages très typés sans être caricaturaux, mais j’ai eu de la peine à m’attacher à eux et je me suis demandé si vous les aimiez ….
Je me sens très proche de mes personnages. C’est vrai que je leur mène la vie dure, rien ne leur est épargné. Mon attention étant de les pousser dans leurs retranchements, à les inciter à trouver des solutions et à les faire évoluer dans une direction qui les pousse à se remettre en question.
Quels sont vos inspirations littéraires ?
J’ai lu des milliers de livres de genres très différents. Tout m’intéresse tant que cela éveille en moi une émotion.
Le premier polar que vous avez lu ?
Flic story de Roger Borniche. On parle des années 80-90. J’en garde un souvenir assez flou.
Votre polar culte ?
James Ellroy, L.A. Confidential. Je l’ai lu onze fois, il y a trente ans. À mes yeux, ce livre est un chef-d’œuvre. C’est une descente absolue dans l’enfer de ce qu’un humain est capable de faire, en même temps les personnages luttent intensément pour leur rédemption. Ces forces contraires génèrent un combat dont l’issue dépend principalement de la volonté et de l’envie profonde de s’en sortir.
Comment voyez-vous la suite de votre parcours d’écrivaine ?
L’écriture du deuxième est à bout touchant car il me tenait à coeur de l’écrire avant même que je reçoive des retours, des avis et des critiques sur Une fille hors pères.
Je ne voulais pas être influencée. J’ai écrit mon deuxième roman tel que je l’avais imaginé. Ce ne sera pas un polar.
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