Après deux opus sur le pape François, le journaliste suisse Arnaud Bédat publie aujourd’hui un nouveau livre: les souvenirs de Jean Liardon, le « dernier témoin » de la vie de Jacques Brel. Près de dix années d’amitié avec un géant de la chanson racontées dans « Voir un ami voler – Les dernières années de Jacques Brel », un livre passionnant qui vient de paraître aux éditions Plon. Interview.

Pourquoi ce livre maintenant ?
D’abord à cause de prodigieux hasards de la vie. Un ami très cher, Marc Bolay, qui tient l’Auberge Saint-Gabriel à Montréal, m’a mis sur la piste de Jean Liardon lors d’un passage chez lui en décembre 2015. Il a joué les intermédiaires. Quelques semaines plus tard, je mangeais avec le vieil ami de Brel à Cointrin dans une pizzeria de l’aéroport. L’idée du livre est née bêtement ce jour-là… « Je suis aviateur, pas écrivain », me dit-il. Alors, en avril 2017, nous nous sommes mis au travail…
Brel et Liardon, c’est l’histoire d’une indéfectible amitié de près de dix ans…
Oui, Jean Liardon, 77 ans, raconte les dernières années de Jacques Brel, celle d’un homme ayant quitté le tour de chant où il a tenu le haut de l’affiche pendant quinze ans pour s’adonner à de nouvelles passions, d’abord en quête de lui-même : le cinéma, comme acteur et comme metteur en scène, l’aviation comme pilote, et la navigation, à la barre d’un vieux voilier, à la recherche d’horizons nouveaux, avant de revenir à Paris, miné par le cancer, enregistrer un ultime album-testament et livrer son dernier combat contre la maladie.
« Mon fidèle Jean… celui-là, on en a fait des coups ensemble », répétait volontiers Jacques Brel. Il « était l’ami des balades en avion, l’ami des coups durs », dira Maddly, la dernière compagne du chanteur.
Les deux hommes se sont connus à l’Ecole les Ailes à Genève – Genève et la Suisse sont très présents dans le livre: c’est Liardon qui avait appris à Brel, qui rêvait d’être pilote professionnel, à piloter un jet. Puis ensemble, ils firent les 400 coups et voyagèrent un peu partout en Europe, aux Antilles, en passant même par le Groenland ! Jean Liardon fut un spectateur privilégié, de la fuite aux Marquises, de l’enregistrement du dernier album, et de la terrible maladie de son ami traqué par les paparazzis. Ils furent ensemble pratiquement jusqu’au dernier jour.

Vous êtes parti aussi sur les traces de Brel aux Marquises…
Oui, c’était le gros « trou » manquant dans un ouvrage qui évoque « les dernières années de Jacques Brel » : Jean ne s’est jamais rendu aux Marquises malgré les relances incessantes de Jacques. Donc ça me paraissait indispensable de me rendre sur place et de retrouver les tout derniers témoins de l’exil polynésien.
J’ai été déçu en bien, comme disent les Vaudois. Je ne pensais pas trouver tant de traces, tant de témoins, d’anecdotes inédites. Vous verrez, là-bas dans les îles lointaines, il en ressort aujourd’hui, dans le long épilogue du livre, un portrait vraiment inédit du Grand Jacques.
Info:
Voir un ami voler
Les dernières années de Jacques Brel
par Jean Liardon et Arnaud Bédat
Ed. Plon
Merci à Jean Revillard/REZO pour la photo